MN : On a récemment appris que c’est vous qui avez été nommé adjoint d’Anatoliy Poloskov, gouverneur de l’oblast de Zakarpattia. En votre personne, il disposera donc désormais également d’un adjoint ethniquement hongrois : comment cette idée a-t-elle fait son chemin ?
IP : Je connais Anatoliy Poloskov depuis longtemps. A la tête de l’arrondissement de Berehove (d’abord en qualité d’adjoint, puis de titulaire), je collabore avec lui depuis dix ans. Il est parfaitement conscient du fait que son département est, entre autres, une mosaïque de minorités ethniques, dont la population inclut aussi de nombreux magyarophones. C’est pour cette raison qu’il m’a demandé de devenir l’un de ses adjoints – proposition que j’ai accueillie avec enthousiasme, et acceptée.
MN : A quel niveau hiérarchique une telle nomination doit-elle être approuvée ?
IP : C’est Poloskov qui m’a choisi,mais la question a naturellement dû être préalablement examinée par son ministère de tutelle, et sa proposition a dû recevoir l’approbation du président ukrainien Volodymyr Zelensky, avec qui Poloskov a eu une rencontre avant sa propre nomination, au cours de laquelle ils se sont consultés sur de nombreuses questions, et notamment sur l’équipe dont Poloskov comptait s’entourer. Le président Zelensky n’a pas émis de réserve á mon encontre : après tout, moi aussi, il me connaît – mon travail á la tête d’un arrondissement nous ayant donné plusieurs occasions de nous croiser.
MN : Certains considèrent que votre nomination représente une formidable opportunité pour les hongrois de Subcarpatie, et pourrait mener á un réchauffement des relations magyaro-ukrainiennes, quelque peu gelées ces derniers temps. Selon d’autres, elle n’a pas d’autre finalité que de permettre au parti au pouvoir á Kiev de déclarer en guise d’alibi que « l’adjoint au gouverneur est un hongrois ». Qu’auriez-vous á répondre á ces derniers pour les tranquilliser ?
IP : L’année dernière, des élections locales ont eu lieu en Ukraine. Elles ont permis aux partis de la minorité hongroise de s’assurer des mandats dans diverses administrations locales. Après les élections, néanmoins, ces partis n’ayant pas réussi á se mettre d’accord avec la majorité présidentielle en vue de la formation d’une coalition, aucun homme politique hongrois n’a été nommé á la direction administrative du département. Dans un tel contexte, je considère ce poste d’adjoint au gouverneur comme une opportunité magnifique, qui me permet de plaider la cause de ma minorité ethnique. J’aimerais avoir un rôle constructif, et je pense qu’il faut normaliser la situation : les deux pays ont besoin de rapports de bon voisinage.