En 1990, au moment où elle aborde sa transition vers l’économie de marché, la Roumanie est le pays de la région présentant le niveau de développement le plus bas : 34,3% de la moyenne de l’UE, contre 39,6% pour la Pologne, 56,9% pour la Hongrie et 81,4% pour la Tchéquie. Et, même si les premières données disponibles pour la Slovaquie, datant de 1992, font apparaître un niveau de 43,2%, ce niveau a dû être plus élevé en 1990, avant la crise provoquée par la transition économique – et devait donc nettement dépasser, lui aussi, le niveau roumain.
Entre cette année-zéro de 1990 et l’année 2020, l’économie roumaine a néanmoins atteint le niveau de rattrapage le plus rapide de la région : 37%, soit juste un peu plus que les 36,5% du rattrapage polonais. Cette performance représente plus du double de la vitesse de rattrapage de la Hongrie (17,5%), et près du triple de celle des Tchèques (12,7%). En 2020, le niveau de développement de l’économie roumaine rapporté à la moyenne de l’UE (soit 71,3%) est proche du niveau slovaque (mesuré à 71,6%), talonnant – une première historique – le niveau hongrois (74,4%). Cette performance fait de la Roumanie le pays de la région qui a réussi le rattrapage le plus rapide. Parmi les pays post-communistes en général, seules l’Estonie et la Lituanie ont été plus rapides.
Ne serait-ce qu’en raison de notre proximité historique et géographique, nous devons donc nous poser la question : quelles sont les bases de ce si rapide rattrapage roumain ?
Examinons quelques facteurs :
Partant du niveau des Pays baltes, la Roumanie a, bien que située au midi, pris « la voie du Nord », choix qui s’est certes soldé par de moindres fluctuations de croissance, mais aussi par de plus profonds déséquilibres.
Le modèle roumain a certes pu égaler la dynamique de croissance générée par les Pays baltes, mais il a dû en payer le prix : un profond déséquilibre financier. Les déficits budgétaires, le taux d’endettement public, le déséquilibre de la balance des paiements, l’inflation et la vulnérabilité financière – dans tous ces domaines, la Roumanie des dernières décennies a fait pire que la moyenne de la région, et même pire que les niveaux atteints par les Pays baltes. Calibré pour l’obtention d’une croissance rapide, son modèle est dépourvu d’équilibres durables : c’est la raison pour laquelle le rattrapage roumain n’est pas encore durable.