László Szőcs: Récemment, le monde entier a commémoré le 20ième anniversaire des attaques terroristes du 11 septembre. Pourtant, depuis 2001, le mode de fonctionnement du terrorisme mondial a évolué. Qu’en pensez-vous ?
Diego Muro: Historiquement, des anarchistes du temps jadis jusqu’au terrorisme gauchiste (comme celui de la Fraction Armée Rouge), en passant par les violences de la décolonisation, le terrorisme s’est toujours présenté sous forme de vagues. Ce qui frappe depuis les années 1970 et 1980, c’est l’image toujours plus précise de motivations religieuses derrière le terrorisme, et le fait qu’il semble lié à l’Islam, et tout particulièrement à l’extrémisme sunnite. Dans le cas de deux des « marques dominantes » du terrorisme islamiste – Al-Qaeda et l’État Islamique (ISIS) –, on observe qu’elles se propagent par agrégation de petits groupes autonomes combattant au niveau local, qui les rejoignent en déclarant leur allégeance. Il y a donc à la fois centre et décentralisation, et la tension qui se crée entre les deux joue, elle aussi, un rôle. Mais nous avons tendance à surestimer le rôle du centre. Sur Al-Qaeda, on dispose maintenant de recherches approfondies, et on sait désormais que tout cela n’a pas été inventé au Pakistan, comme on l’a longtemps cru. Aujourd’hui, Al-Qaeda représente à nouveau pour le monde une menace bien plus grave qu’ISIS, organisation dont l’idéologie est certes toujours vivante, mais qui est asphyxiée sur le plan organisationnel, qui a été vaincue et ne menace même plus l’intégrité territoriale de la Syrie et de l’Irak.
László Szőcs: En Europe, les auteurs d’actes terroristes islamistes sont typiquement des immigrés ou des citoyens issus de l’immigration. C’est ce que nous rappelle le plus grand procès pour terrorisme actuellement en cours, à Paris, avec, sur le banc des accusés, Salah Abdeslam, né à Bruxelles, mais citoyen du Maroc et de la France. Et pourtant, il se trouve malgré tout des voix pour nier tout lien entre immigration et terrorisme.